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Les amants d’Aïn Sakhri : lorsque le plus vieux baiser du monde s’inscrivait dans la pierre…

Les "Amants d'Aïn Sakhri"
Aïn Sakhri (Cisjordanie, près de Bethléem)
Calcite. H. : 10,2 cm
Vers 12000 av. J.-C.
British Museum (1958,1007.1)
© The Trustees of the British Museum

Il y a 12000 ans environ, alors que les hommes commençaient à se sédentariser dans la pointe occidentale du Croissant fertile, l’un d’entre eux a façonné dans un simple galet de calcite d’à peine plus de 10 cm de haut une image devenue aujourd’hui universelle, celle de l’union de deux êtres enlacés, assis l’un en face de l’autre.
L’un a les jambes repliées, les bras posés délicatement sur les épaules de l’autre, serré tout contre lui, jambes enveloppées autour de sa taille. On ne peut distinguer les traits de leurs visages, mais à l’évidence, leur étroite étreinte suggère l’échange d’un baiser.

Mise au jour dans l’une des grottes d’Aïn Sakhri, près de Bethléem, cette sculpture unique, à la résonance intemporelle, nous offre l’image complexe d’un acte érotique dont le sens mystérieux nous échappe. Simple expression d’une intimité personnelle, réflexion sur l’amour humain ou traduction d’une symbolique liée à la fertilité, il s’agit à ce jour de la plus ancienne sculpture connue représentant un rapport sexuel humain.

Le galet a été habilement sculpté de sorte que, quel que soit l’angle sous lequel il est regardé, la forme phallique de la sculpture ne dévoile jamais les caractères sexuels du couple représenté, laissant planer, aux yeux de certains, une subtile ambiguïté.

Sur le plan archéologique, cette statuette date de la période natoufienne (12 500-10 200 avant J.-C.), époque décisive dans l’histoire de l’humanité, où les hommes s’établissent pour la première fois dans de petites maisons rondes semi-enterrées, regroupées dans de micro-villages.
Ces premiers sédentaires sont encore des chasseurs-cueilleurs. Aucune trace d’agriculture ni d’élevage n’est alors attestée. Mais c’est à eux que l’on doit les plus anciens exemples connus d’un véritable art mobilier en os ou en pierre.
Représentant essentiellement de petits herbivores (principalement des daims et des gazelles), cet art délicat et élégant ne compte que quelques rares représentations humaines, très schématiques, figurées sur des galets de pierre.
Les Amants d’Aïn Sakhri en sont l’exemple le plus original et le plus accompli.

Identifiée en 1933 par le préhistorien René Deuville, alors vice-consul de France à Jérusalem, la petite sculpture est acquise par le British Museum en 1958. Elle en constitue depuis l’une des œuvres les plus célèbres et les plus populaires.

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